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Comment économiser les 21,1 milliards d'euros annoncés par François Fillon

Le Gouvernement a annoncé un nouveau plan de rigueur reposant davantage sur des économies réalisées sur les dépenses que le précédent plan. Dans ce plan, si certaines économies sont connues, d'autres, portant sur les dépenses de l'État et de l'Assurance maladie, sont en cours d'arbitrage (21,1 milliards d'euros cumulés en 2016). La Fondation iFRAP fait ici des propositions concrètes au Gouvernement pour tenir cet objectif.

Un nouveau plan de rigueur a été présenté cette semaine. Il le fallait puisque la croissance pour 2012 est prévue non plus entre 1,2 et 1,7% mais autour de 1% (voire à 0,7% selon la commission européenne). Cette situation, proche de la récession, est due évidement à la crise de la dette. Crise issue de 30 ans de dépenses publiques déséquilibrées.

Dans sa présentation jusqu'en 2016, ce plan semble se tenir sur le papier puisqu'il affiche d'une part 36,7 milliards d'impôts supplémentaires mais aussi 28 milliards d'économies sur les dépenses.

Sur ces 28 milliards d'euros d'économies, 4,4 milliards seront issus du raccourcissement de la phase transitoire de la réforme des retraites (âge légal porté à 62 ans en 2017) et 2,5 milliards sur l'indexation des prestations familiales et aides au logement, non plus sur l'inflation, mais sur la croissance (soit 1% d'augmentation pour l'an prochain ce qui correspond non plus à une augmentation de 6 euros par mois des allocations familiales mais de 3 euros pour les familles de 3 enfants).

Pour les 21,1 milliards d'euros restant à trouver sur les dépenses de l'État et de l'Assurance maladie, plusieurs pistes peuvent être proposées.

1- Sur le volet État, pour permettre une économie sur le poste qui augmente le plus (hors charge de la dette) dans le PLF 2012 (36 milliards en 2011 à 37,9 en 2012), une possibilité serait de modifier le calcul des retraites publiques en les indexant non plus sur l'inflation mais sur la croissance [1]. Les dépenses de retraites pour les trois fonctions publiques sont de 52 milliards d'euros par an. Rien que pour l'État, ce serait 5,55 milliards qui pourraient être économisés d'ici 2016.

Ce changement d'indexation provisoire serait d'autant plus justifié que, du côté des retraites privées, la retraite CNAV a été indexée sur l'inflation et non plus sur les salaires, depuis 1993, soit 10 ans plus tôt. Les retraites complémentaires ARRCO/AGIRC sont en principe indexées elles aussi sur l'inflation. Leur montant représente 40% du montant des retraites privées, et ont, elles, tendance à baisser (-0,1% par an sur les 10 dernières années).

Par ailleurs, les traitements des fonctionnaires pourraient être également indexés sur la croissance et non plus sur l'inflation. Avec la GIPA, qui garantit que les salaires des fonctionnaires ne puissent pas évoluer moins vite que l'inflation (7,2% des agents en 2008), le risque, si celle-ci venait à être plus forte, serait que le coût des traitements de l'ensemble des personnels publics dérape très fortement. En 2008, ce sont 130.000 fonctionnaires d'État qui en ont bénéficié pour un coût total de 100 millions pour l'État. Geler la GIPA de manière temporaire sur 5 ans permettrait d'économiser 1,5 milliard d'euros sur la période.

2- Sur le volet Assurance maladie, qui est prévu par le Gouvernement à 700 millions d'euros d'économies dès la première année, la proposition de la Fondation iFRAP est de faire converger les tarifs des hôpitaux publics et des cliniques. L'hôpital public représente en effet, sur ses tarifs à l'acte, un gisement d'économies potentielles de 7 milliards d'euros par an. Cela a été confirmé par la Cour des comptes dans son rapport sur les finances de la Sécurité sociale [2]. En faisant converger à hauteur de 700 millions d'euros dès la première année les tarifs des hôpitaux avec ceux des cliniques, ce seraient 8,5 milliards d'euros qui pourraient être économisés sur les dépenses d'assurance maladie d'ici 2016.

Bilan des efforts proposés par la Fondation iFRAP : 15,5 milliards d'euros d'économies sur les dépenses de l'État et de l'Assurance maladie d'ici 2016.

Restent deux hypothèses à explorer pour faire des économies en plus :

- gel du salaire des fonctionnaires d'État, près de 2 milliards d'économies par an [3]
- cocktail de mesures visant le train de vie de l'État et des opérateurs mais aussi, inévitablement, des collectivités locales en touchant les concours normés de l'État aux territoires.

Alors même que la France a atteint ses limites en matière de prélèvements obligatoires, une certitude : le sauvetage de nos finances publiques ne pourra plus désormais passer que par une baisse résolue et quasi exclusive des dépenses [4].

[1] Les retraites des régimes de fonctionnaires (indexées jusqu'en 2003 sur le niveau des traitements des agents publics et, depuis 2003, sur l'inflation) augmenteront donc de 1% et non plus 2%.

[2] Un rapport de l'ATIH (Agence technique de l'information sur l'hospitalisation) établit pour 2009 à 26% le surcoût du secteur public en prenant comme base de référence l'activité de ce même secteur.

[3] Un gel qui inclurait un blocage temporaire de l'évolution des grilles indiciaires. Il existe en effet quatre moyens de faire évoluer les salaires publics : toucher au point de fonction publique, déjà gelé, permettre le rattrapage de l'inflation via la GIPA (que nous proposons de bloquer), faire évoluer la grille indiciaire : un même grade étant rémunéré en fonction d'un plus grand nombre de points de fonction publique (280 passant à 300 par exemple), enfin jouer sur le niveau des primes.

[4] Voir le récent rapport de la commission européenne sur l'économie européenne, European Economic Forectast Autumn 2011, p.124 qui demande à la France d'aller encore au-delà, dû selon elle à un différentiel des prévisions marcoéconomiques de 0,6%. A la clé, le besoin d'un potentiel troisième train de mesures d'économies de 4 milliards d'€.