Actualité

En matière de contrôle fiscal, la charge de la preuve incombe à l'administration

... en théorie sans doute !

C'est avec un CAP de plombier pour seul diplôme que Gabriel fuit la Hongrie en 1980. Il a choisi la France, pays des Droits de l'Homme. Cette terre d'asile l'accueille en tant que refugié politique.

Nous sommes le 4 mars 1980. Sans argent, sans amis, sans connaissance de la langue, Gabriel aura comme abri le métro parisien. Pour survivre, il fera tous les métiers : homme à tout faire, manœuvre, jardinier, etc.

Travailleur et courageux, il deviendra rapidement son propre patron, entrepreneur du bâtiment, commerçant, restaurateur, gérant de société. Le fisc français le contrôlera pour ses trois activités. Les contrôles se soldent par une quasi absence de redressement.

Gabriel est père de cinq enfants. Il est propriétaire de sa maison grâce à un crédit bancaire remboursé sur 15 ans, non sans mal. En 2008, il retournera vivre en Hongrie pour sa retraite.

En juin 2000, c'est le coup de foudre. Gabriel tombe amoureux. Le 22 juillet 2000, il épouse en deuxième noce la jeunette qui trouble son cœur. Rapidement, le rêve devient cauchemar.

Gabriel se rend vite compte que sa jeune épouse a une conception très matérialiste des sentiments. Chèques et cartes bleues eurent bientôt raison des économies de Gabriel. Lorsqu'il intervient pour limiter la fièvre acheteuse de sa bien-aimée, celle-ci quitte le domicile conjugal.

Gabriel consulte un avocat. Celui-ci lui conseille de mettre ses dernières économies à l'abri : « Retirez votre argent de votre compte bancaire et mettez-le dans le coffre à la banque ». Gabriel s'exécute. Il effectuera de petits retraits avec sa carte, pour que cela ne paraisse pas suspect à son épouse, de fin 2000 à 2002 et dépose les espèces dans le coffre de la BNP.

Une fois le divorce prononcé (le 28 janvier 2005), Gabriel vide le coffre et remet 94.500 euros sur son compte bancaire, celui duquel ont été effectués les retraits.

En 2008, l'administration fiscale procède à un examen de la situation fiscale personnelle de Gabriel. L'inspecteur considérera que la somme de 94.500 euros constituait un revenu d'origine indéterminée et le taxera à l'impôt sur le revenu.

Je me dois de préciser qu'il qualifiera également de revenus les sommes suivantes :

- remise de chèque de 690 euros en date du 14/09/2005 correspondant à la vente d'un ordinateur personnel. Gabriel a fourni la facture d'achat à l'inspecteur mais celui-ci ne peut croire qu'un ordinateur acheté 763 euros ait pu se revendre à 690 euros,
- idem pour la vente d'un appareil de musculation pour 2.500 euros.

Je vous fais grâce des autres points redressés par l'inspecteur.

La charge de la preuve incombe à l'administration. Dans notre cas, elle constate une rentrée d'espèces sur son compte bancaire et estime par cette unique évidence qu'il s'agit d'un revenu.

L'argument est faible. Pourtant l'administration aura gain de cause dans de nombreux cas similaires. Gabriel n'a que sa bonne foi, son honnêteté et son honneur pour tenter de convaincre l'inspecteur. Sera-t-il imposé une seconde fois sur ses économies ? L'addition s'élève à 30.000 euros.

Gabriel m'a contacté car il lit ma tribune. Je lui ai conseillé de se faire assister par un avocat fiscaliste. Il n'a pas eu de chance, les avocats parisiens qu'il a contactés lui demandent un acompte de 10.000 euros pour la prise en charge du dossier.

Finalement, il en rencontrera un qui acceptera de le recevoir. La consultation durera 20 minutes et lui coûtera 500 euros. Sa conclusion est claire. « Vous n'avez aucune chance de gagner dans cette affaire face à l'administration. Vendez vos biens en France et fuyez en Hongrie. »

Gabriel n'ose pas y croire : fuir comme un criminel ? Abandonner la France, sa terre d'asile, son pays d'adoption ? Que va-t-il dire à ses enfants : « Je suis un malfrat et je suis recherché en France » ? La France serait-elle devenue communiste ?

Gabriel reprend rendez-vous chez l'inspecteur :

- Monsieur l'Inspecteur, je suis un honnête homme. J'ai travaillé très dur. Vous me connaissez bien maintenant. Pourquoi tant d'obstination ? Pourquoi tant d'acharnement ? Vous êtes un homme d'expérience, vous savez reconnaitre un honnête homme d'un voleur.
- Vous êtes sans doute un homme honnête mais vous ne pouvez pas le prouver.

Je suis impuissant devant le malheur de Gabriel. J'ai honte d'être français. Je ne doute pas de la sincérité de Gabriel.

L'administration ne prouve rien. Elle ne fait que constater le versement en espèces sur un compte bancaire, en admettant tout de même qu'il y a eu des retraits de ce même compte pour le même montant. Mais rien ne prouve qu'il s'agisse bien du même argent. Cela est bien maigre.

J'accompagnerai Gabriel s'il le souhaite à la Commission des Impôts. Si Gabriel avait réellement une activité occulte, aurait-il été assez stupide pour mettre ses recettes sur son compte bancaire ?

Vous aussi vous pouvez l'aider en réagissant et en faisant connaitre cette histoire.

Merci de votre soutien.