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Réforme du statut des loueurs en meublé professionnels

Quand le plafonnement d'une niche freine la pluriactivité

La pluriactivité est une caractéristique que la législation fiscale a du mal à apprécier. C'est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles le statut de l'auto-entrepreneur a été introduit par le secrétaire d'Etat aux PME Hervé Novelli avec le succès que l'on sait.
Quant à elle, la réforme du statut de loueur en meublé professionnel (LMP) issue du plafonnement de la niche fiscale correspondante, ne tolère pas cette pluriactivité.
Explications :

Le double plafonnement des niches fiscales

C'était une promesse gouvernementale faite dans la loi de finances : pas une seule niche fiscale ne serait exonérée d'un plafonnement individuel niche par niche tandis qu'un plafonnement global serait décidé pour l'ensemble des niches IR. Aussitôt dit, aussitôt fait : dans l'attente d'une évaluation complète de l'efficacité économique des niches fiscales, le plafonnement global a été voté cet hiver à 25 000 € plus 10% du revenu brut imposable. Dans la foulée l'ensemble des dispositifs jusqu'alors non plafonnés étaient réduits à la portion congrue : l'investissement dans les DOM-TOM au coût brut important pour les finances publiques (250 millions d'€) voyait son avantage fiscal limité alternativement à 40 000 € net de droit de restitution à l'exploitant ou 15% du revenu brut imposable ; le dispositif Malraux, si utile pour la rénovation des centres villes historiques de nos agglomérations françaises se trouvait limité de 25% à 35% du montant des travaux suivant la situation géographique des bâtiments dans la limite d'un montant total de 100 000 €.
Enfin, même la niche fiscale « monuments historiques » théoriquement non plafonnée pour permettre la sauvegarde sur fonds privés d'un patrimoine historique que l'Etat ne saurait prendre à sa charge, se voyait limitée à une déduction fiscale du revenu imposable égale à 200 000 € lorsque ces « monuments » n'étaient pas ouverts au public.

Les effets pervers du plafonnement de la niche LMP

Le plus étonnant à vrai dire est l'acharnement dont a été victime le statut dit de « LMP », les loueurs en meublé professionnels. Niche fiscale particulièrement faible, puisqu'elle ne représentait en 2008 qu'une dépense budgétaire brute de 12 millions d'€, comparé aux dépenses autrement plus importantes des niches DOM-TOM, ou Robien, culminant respectivement à 250 et 350 millions d'€. En conditionnant le loueur de meublé à rassembler deux conditions cumulatives, 23 000 € de recettes annuelles tirées de l'activité LMP et représentant plus de 50% des revenus d'activité professionnelle, les entrepreneurs pluriactifs perdent de facto le bénéfice de la mesure. Le système antérieur doté des deux seuils sus-mentionnés alternatifs rendait aisé d'adjoindre cette activité à d'autres sources de revenus tout en démontrant le sérieux de son investissement : être immatriculé au RCS (registre du commerce et des sociétés) et dans cette hypothèse, parvenir à dégager tout de même 23 000 € de revenus annuels tirés de cette activité.

Aujourd'hui, le statut de LMP se retrouve fortement déstabilisé. Les mesures transitoires à prendre pour les loueurs en meublés professionnels actuels en vue de réussir à articuler l'ancien système et le nouveau, sont particulièrement complexes et singulièrement injustes :
-Particulièrement complexes : Le loueur LMP devra évaluer le plafond constitué par ses recettes locatives annuelles «  pour un montant quintuple de leur valeur, diminué des 2/5ème de cette valeur, par année écoulée depuis le début de la location, dans la limite de dix ans à compter du début de celle-ci ». Après avoir effectué ce calcul, le contribuable devra vérifier que ses autres revenus toutes sources confondues hors revenus LMP ne dépassent pas ce montant qui représente pour le législateur la fameuse condition de 50% des revenus d'activité.
-Singulièrement injustes : La clé de calcul implique que, plus l'activité de location meublée est exercée depuis longtemps, plus les contribuables sont pénalisés. En effet, la diminution des 2/5ème est multipliée par le nombre d'années depuis le début de location pour un maximum de 10 ans. Les « vieux » LMP depuis plus de dix ans verront le montant du seuil de leur recettes LMP diminué de : 10 x 2/5 = 20/5
Ils auront donc toutes les chances dans ces conditions de dépasser avec leurs autres revenus le montant limite de leurs revenus LMP et de se voir refuser le bénéfice du nouveau statut.

Le nouveau système est donc tout à la fois extrêmement rude et complexe. Les loueurs pluriactifs n'auront plus qu'à cesser leurs autres activités ou au contraire quitter le statut de LMP. Un choix cornélien lorsque l'on sait que le statut de loueur LMP permet d'imputer les déficits fonciers issus de cette activité sur le revenu global et d'exonérer d'ISF le montant du patrimoine loué. Un choix difficile en attendant que l'instruction fiscale définitive concernant les LMP paraisse. Quand ? Nul ne le sait.