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Niches fiscales : Le Sénat prend ses responsabilités

Le Sénat par l'intermédiaire du rapporteur général de la commission des finances, Philippe Marini, a pris ses responsabilités en matière de traitement de l'épineuse question des niches fiscales. Et l'iFRAP ne peut que souscrire à l'approche retenue par la haute assemblée sur cette question.

Nous avions proposé en effet dans notre étude sur les niches fiscales, un certain nombre de dispositions afin de développer et d'encadrer leur usage. Rappelons-les pour mémoire :

- Examiner toutes les dépenses budgétaires qui pourraient être remplacées par des niches fiscales
- Tenir une recension des niches fiscales nouvelles et distinguer les niches sortant effectivement du périmètre ou celles annulées
- Consolider les niches dans le budget LOLF
- Evaluer toute proposition de niche ex ante, afin d'avoir une base de référence pour l'évaluation ex post.
- Ne créer que des niches à durée limitée (de 3 ou 5 ans) afin d'obliger à leur réévaluation périodique
- Intégrer les niches à la norme de dépenses budgétaires pour limiter la croissance du total à zéro en volume.

Nous nous félicitons que le Sénat ait repris la plupart de nos propositions et converge avec nous sur les autres. Ainsi Philippe Marini n'a pas hésité à définir dans son rapport sur les prélèvements obligatoires et leur évolution, une approche en 4 objectifs parfaitement compatibles avec ceux que nous définissions plus haut :

- progresser dans l'évaluation des dépenses fiscales
- inclure les dépenses fiscales dans la norme de dépense
- renforcer la fongibilité entre dispositifs de dépense budgétaire et de dépense fiscale
- rendre temporaires et donc incitatifs tous les dispositifs de dépense fiscale

Et pour ce faire, la commission des finances du Sénat a pris un certain nombre de dispositions courageuses :

- D'une part, elle a établi un principe de compensation entre niches fiscales, afin de maîtriser à volume constant la norme des dépenses fiscales. Désormais toute niche fiscale créée devra être compensée par une annulation d'une autre dépense fiscale. Ce qui ne règle pas pour autant la question de la croissance spontanée de l'enveloppe des dépenses fiscales, mais permettra d'afficher un objectif de croissance zéro en volume à l'image de la norme de dépense budgétaire.
- D'autre part, la compensation des niches devra avoir lieu chaque année et non renvoyée à une période indéfinie au sein de la programmation pluriannuelle (amendement n°8 à l'article 10 du projet de loi de programmation des finances publiques).
- Enfin, les niches seront toutes évaluées suivant un principe de double échéance :
- Les niches antérieures au PLF 2009 représentant le « stock » des 507 niches devront avoir été évaluées pour le 10 juin 2011.
- Les niches postérieures au PLF 2009 auront une durée de vie initiale programmée pour 3 ans (amendement n°9 à l'article 10 du projet de loi de programmation des finances publiques 2009-2012) et devront être évaluées à l'issue des 3 ans suivant leur création (délai finalement étendu à 4 ans par le Gouvernement).

Point restant à régler auquel l'iFRAP attache une grande importance et sur lequel le sénateur Marini a porté une attention toute particulière : celui de la « fongibilité entre les dépenses budgétaires et les dépenses fiscales » ce qui supposerait l'existence d'une norme de dépense commune. Comme il le reconnaît lui-même « On est encore éloigné de la norme globale souhaitée idéalement par votre rapporteur général, dès lors que pour lui un euro de dépense fiscale équivaut à un euro de dépense budgétaire. »

Cet engagement fort nécessitera donc au préalable l'évaluation totale des niches, pour permettre de fusionner les deux normes de dépenses. Afin de stabiliser la progression des dépenses publiques, il a été actuellement imposé un objectif de maîtrise à zéro en volume de chacune des deux enveloppes. Il faudra ensuite basculer vers un objectif de zéro en volume pour l'ensemble.
Pour cela, il faudra alors résoudre la question préalable du taux de croissance spontanée des deux ensembles pour définir un taux synthétique global (rappelons que la croissance spontanée représente l'accroissement en volume plus que proportionnel par rapport au PIB d'un certain nombre de dépenses, par exemple la PPE, ainsi même en appliquant le principe du zéro en volume, les niches fiscales progresseront de 4% en 2009).
Une fois défini il s'agira de le compenser en utilisant précisément la fongibilité entre les deux sous-ensembles et couper dans les dépenses budgétaires et fiscales. Il sera alors possible d'arbitrer entre les niches ou les dépenses fiscales en fonction de leur plus grande efficacité en matière de politiques publiques.

Nous n'en sommes pas encore là… reste que les propositions du Sénat s'inscrivent parfaitement dans une utilisation dynamique des « niches fiscales » pour enfin parvenir à leur faire remplir leur rôle « d'arme budgétaire moderne ».