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La HALDE dans le collimateur du Parlement

Avec un loyer de 1,5 million d'euros par an pour 2126 mètres carrés et 84 salariés, la HALDE [1] vit sur un train luxueux. L'iFRAP l'avait démontré et cela commence à se savoir. Tant et si bien que le député Richard Maillé et plusieurs de ses collègues ont déposé un amendement visant à diminuer les crédits de la Halde et ont réussi à rogner 1 million dans les crédits de la HALDE, les faisant passer de 12,9 à 11,9 millions d'euros. Une lecture des débats qui se sont déroulés en commission des Finances de l'Assemblée nationale le 5 novembre dernier est éclairante :

« M. le président Didier Migaud. Je comprends la démarche de notre collègue Richard Mallié, mais est-il vraiment judicieux de concentrer notre attention uniquement sur la HALDE ? Le Comité d'évaluation et de contrôle (CEC), récemment mis en place, a retenu comme sujet d'investigation les autorités administratives indépendantes dans leur ensemble. Il est donc souhaitable d'attendre que le comité ait avancé dans son travail, compte tenu des éléments nouveaux d'appréciation qu'il ne va pas manquer de nous apporter. Il serait très dommage de frapper la HALDE pour des raisons largement symboliques.

Chacun partage le diagnostic des auteurs de l'amendement sur le problème du loyer exorbitant payé par la HALDE. France Domaine travaille sur ce dossier et j'en appelle à l'esprit d'ouverture de M. Richard Mallié pour l'inviter à retirer cet amendement. En effet, il sera temps, après la conclusion des travaux du CEC, et le cas échéant après des investigations qui pourraient être demandées à la Cour des comptes, de prendre les mesures législatives pertinentes.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Le CEC manifeste une volonté réelle de mener des investigations avec beaucoup d'allant. J'ai été très impressionné par la réunion de ce matin au cours de laquelle plusieurs thèmes ont été retenus dont celui de l'évaluation des autorités administratives indépendantes. Tout le monde est d'accord sur le coût exorbitant du loyer payé par la HALDE, mais la question de l'ajustement des moyens des autorités administratives indépendantes mérite d'être traitée maintenant dans le cadre du CEC.

M. le président Didier Migaud. Nos collègues Jérôme Chartier et Jean-Pierre Brard ont été désignés pour représenter la commission des Finances au CEC, mais rien ne s'oppose à ce que notre collègue Richard Mallié fasse bénéficier le comité de sa présence et de son expérience.

M. Richard Mallié. Je n'ai pas l'intention de retirer cet amendement. En effet, dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2007, donc il y a trois ans, Mme Béatrice Pavy avait déjà attiré l'attention de la commission des Finances sur le loyer exorbitant payé par la HALDE. Cet organisme a pourtant attendu le mois de septembre 2009 pour saisir France Domaine. Depuis, notre collègue du Sénat, Mme Nicole Bricq, a produit, le 1er juillet 2009, un rapport sur l'État locataire grâce auquel j'ai appris avec stupéfaction que la superficie louée par la HALDE n'était plus de 1 740 m2 mais de 2 126 m2. Il faut très simplement donner un signal fort aux autorités administratives indépendantes afin d'améliorer leur gestion.

M. Gilles Carrez, rapporteur général. Nous nous souvenons très bien que le budget des autorités administratives indépendantes a posé problème dès l'époque du rapport de Mme Pavy, puisqu'en 2006, c'est par une seconde délibération que le gouvernement a imposé une solution dont nous ne voulions pas. La pression est donc constante sur la HALDE pour ce qui concerne sa gestion immobilière.

M. Jean-Pierre Brard, rapporteur spécial. La situation immobilière de plusieurs autres institutions comporte autant d'anomalies que celle de la HALDE, pourquoi donc se focaliser sur elle ? Sa direction ne peut que respecter le bail précédemment conclu.

En attendant, la HALDE améliore ses statistiques d'activité : au 27 octobre 2009, elle avait reçu 8 958 réclamations à comparer à un total de 8 705 pour toute l'année 2008. Le nombre de réclamations traitées s'établit à 9 029 dossiers, soit 40% de plus qu'en 2008 (6 414 dossiers). La HALDE est intervenue 139 fois devant les tribunaux, à comparer à 64 interventions en 2008, avec un taux de succès de plus de 80%. Enfin, le collège de la HALDE a tenu plus de 350 délibérations au lieu de 278 sur l'ensemble de l'année 2008.

Il faut surtout éviter de démotiver ses agents et retenir la suggestion commune du président et du rapporteur général de la commission des Finances, tendant à surseoir à toute mesure prématurée, dans l'attente des travaux du CEC.

Mme Sandrine Mazetier. Personne ne conteste le caractère excessif du loyer payé par la HALDE. Cela étant, le calcul du ratio des personnels de l'autorité rapporté au m2 de surface n'est pas exact en ce qu'il ne prend pas en compte l'activité des 97 bénévoles travaillant pour la HALDE.

L'exposé des motifs de l'amendement a beaucoup évolué mais il comporte encore des éléments symboliques très lourds. On fait état de 50 signataires alors que l'amendement rectifié est signé par MM. Mallié, Binetruy, Bouvard, Dell'Agnola, Diefenbacher, Francina, Gorges et Mmes Grosskost et Pavy.

L'amendement est également inopportun dans la mesure où la HALDE s'est vu confier par la loi du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision la mission de réaliser un bilan de la gestion des ressources humaines des sociétés nationales de programmes, ce qui constitue donc une tâche supplémentaire.

M. Jean-Michel Fourgous. Ce n'est pas parce qu'une institution bénéficie d'une connotation morale qu'elle doit être exonérée des bonnes règles de gestion. Par ailleurs, on aimerait connaître qui est le bailleur des locaux occupés par la HALDE. Ensuite, il n'est pas interdit de porter atteinte à un beau « fromage » de la République. On a parlé de la démotivation des agents de la HALDE, je pense plutôt qu'il convient de ne pas démotiver les entrepreneurs qui, par leurs impôts, paient l'essentiel du train de vie de l'État. Enfin, j'aimerais savoir quel est le salaire du président de la HALDE ainsi que les avantages associés.

M. le président Didier Migaud. Je pense, à titre personnel, qu'il y a probablement trop d'autorités administratives indépendantes, et qu'il convient d'être attentif à la rationalisation de cet ensemble. Le CEC en est saisi, cet amendement apparaît prématuré.

M. Pierre Bourguignon. Les auteurs de l'amendement doivent prendre garde à l'image qu'ils risquent de donner : on pourrait laisser croire que des parlementaires veulent accrocher la HALDE à leur tableau de chasse. Certes, le coût du loyer est déraisonnable, mais, dans le cadre du CEC, un vrai travail de contrôle parlementaire des autorités administratives indépendantes est maintenant engagé. Il ne faut, ni en bonne, ni en mauvaise part, « fétichiser » la HALDE mais prendre le temps des investigations.

M. Richard Mallié. Lorsque le rapporteur spécial évoque les milliers de dossiers traités, il faut savoir que seuls 90% de ces dossiers donnent lieu à des suites. Par ailleurs, la présence des bénévoles est effectivement prise en compte pour le calcul des ratios de personnel au m2. Quelle que soit la mission confiée à un organisme public, les règles de bonne gestion s'imposent. Or, rien ne s'est passé en trois ans. Il ne faut pas reculer aujourd'hui.

Cet amendement est adopté, puis la Commission adopte les crédits de la mission Direction de l'action du Gouvernement ainsi modifiés, le rapporteur spécial M. Jean-Pierre Brard étant défavorable à l'adoption des crédits, compte tenu du vote précédent. »

[1] Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations