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Grève des "dabistes" : sortez l'Etat du conflit !

Les « dabistes », ces employés chargés de l'alimentation des distributeurs automatiques de billets non directement accolés à une banque, sont en grève pour obtenir une augmentation de leur prime de risque, et ont naturellement choisi la période de Noël pour leur mouvement.
"Quand les distributeurs vont commencer à être asséchés, peut-être que le gouvernement va commencer à se préoccuper de nous", a expliqué vendredi à l'Associated Press le porte-parole de la CFDT Pascal Quiroga.

Ce qui intéresse dans cette déclaration, c'est le réflexe consistant à en appeler au gouvernement. Le fonctionnement des DAB ne constitue en rien une mission de service public, et l'Etat n'a rien à faire dans le conflit entre les syndicats et l'organisation patronale.
Il semblerait que la réaction syndicale puisse s'expliquer par la volonté du patronat que l'ensemble des métiers liés à l'activité DAB soit transformé (il s'agit de faire de ces employés des convoyeurs armés) suite à des négociations « en catimini » avec le ministère de l'Intérieur, disent les syndicats qui ajoutent :"Une nouvelle fois, les organisations syndicales sont mises devant le fait accompli et jugent le chantage patronal opposant la sécurité aux salaires inacceptable".

Si cela reflète bien la vérité, on a bien ici la marque d'erreurs successives qui gangrènent quasi systématiquement en France la gestion des conflits collectifs. Pour commencer, pourquoi ce qui touche directement ( et de façon essentielle) au statut des employés des DAB ferait-il l'objet de négociations « en catimini » avec le Ministère de l'Intérieur, avant d'être discuté avec les représentants des salariés ? Et la réaction syndicale, qui est assez automatique, de mettre en cause l'Etat dans ce type de conflits, s'en trouve confortée d'autant.

Pourtant, ce ménage à trois qui réunit syndicats, patronat et Etat, est inefficace. Il déresponsabilise les partenaires sociaux, contraints d'attendre l'arbitrage de l'oracle étatique, lequel consiste souvent à alterner les prises de position en faveur de l'un ou de l'autre. Il participe du recours systématique et « infantilisant » (le mot est de Laurence Parisot qui sait de quoi elle parle) à l'Etat, et il nuit à ce dernier, forcément accusé de ne pas résoudre les problèmes qui en réalité ne relèvent pas de sa compétence.

C'est un mal français très profond, que l'on doit associer aux réflexes du haut fonctionnariat fortement interventionniste et voulant imposer partout son arbitrage. Sur ce sujet, l'Allemagne sait mieux y faire, qui a institué la responsabilité exclusive des partenaires sociaux pour tout ce qui concerne les conditions de travail, et a même inscrit ce principe (dit de l' « autonomie tarifaire ») dans sa Constitution.