Fonds souverain « à la française » pour aider nos PME
Le fonds stratégique de soutien aux entreprises, le fonds souverain made in France, vient de voir le jour. Doté de 20 milliards d'euros, dont seulement 6 milliards utilisables rapidement [1], il est peu de chose face à ses homologues étrangers, dont il s'inspire. En effet, avec un peu plus de 25 milliards de dollars il se situe loin derrière les mastodontes financiers étrangers, à la 23ème place (voir figure 1). Les sommes du fonds sont tellement minces que la capacité d'opposition aux fonds étrangers sont très théoriques. L'exemple du rachat de 4,9% de la banque américaine Citygroup par le fonds souverain d'Abu Dhabi pour 7,5 milliards de dollars en novembre 2007 nous démontre par ailleurs que notre fonds français n'aurait pas la puissance de s'opposer à une telle opération, alors que c'est dans ses objectifs !
Classement | Pays | Nom du fonds | Capitaux (en dollars US) |
---|---|---|---|
1 | Emirats arabes unis | Abu Dhabi Investment Authority | 875 |
2 | Arabie saoudite | SAMA Foreign Holdings | 433 |
3 | Singapour | Government of Singapore Investment Corporation | 330 |
4 | Chine | SAFE Investment Company | 311,6 |
5 | Norvège | Government Pension Fund – Global | 301 |
6 | Koweit | Kuwait Investment Authority | 264,4 |
7 | Chine | China Investment Corporation | 200 |
8 | Russie | National Welfare Fund | 189,7 |
9 | Hong Kong | Hong Kong Monetary Authority Investment Portfolio | 173 |
10 | Singapour | Temasek Holdings | 134 |
11 | Emirats arabes unis | Investment Corporation of Dubai | 82 |
12 | Chine | National Social Security Fund | 74 |
13 | Qatar | Qatar Investment Authority | 60 |
14 | Libye | Libyan Investment Authority | 50 |
15 | Algérie | Revenue Regulation Fund | 47 |
16 | Australie | Australian Future Fund | 43,8 |
17 | Etats-Unis | Alaska Permanent Fund | 39,8 |
18 | Kazhakstan | Kazakhstan National Fund | 38 |
19 | Irlande | National Pensions Reserve Fund | 30,8 |
20 | Brunei | Brunei Investment Agency | 30 |
21 | Corée du Sud | Korea Investment Corporation | 30 |
22 | Malaisie | Khazanah Nasional | 25,7 |
23 | France | Fonds stratégique d'investissement | 25,2 |
24 | Chili | Social and Economic stabilization Fund | 21,3 |
25 | Canada | Alberta's Heritage fund | 16,6 |
Source : Sovereign Wealth Fund Institute, iFRAP |
De plus, il convient de remettre à leur juste place les fonds souverains. Malgré leur forte croissante ces dernières années, la totalité des capitaux des fonds souverains ne représente qu'une part infime des investisseurs institutionnels mondiaux. Comme le montre un article du magazine britannique « The Economist », alors que le patrimoine géré par les fonds souverains s'élève à 3000 milliards de dollars, il n'est que peu de chose face au patrimoine géré par les fonds de pension (près de 21.000 milliards) ou les compagnies d'assurance (18.000 milliards).
Ajoutons que les missions de ce fonds semblent être redondantes avec les missions d'Oséo : l'aide aux PME stratégiques. Avait-t-on véritablement besoin d'un endettement nouveau de l'Etat de 6 milliards d'euros alors que le capital risque investit chaque année plus de 10 milliards d'euros dans les entreprises ?
Plus qu'un fonds souverain aux possibilités d'investissement réduites, à la gouvernance complexe et la réactivité douteuse, nous avons besoin de réformes qui encouragent l'investissement dans les entreprises. La loi ISF TEPA a permis de diriger près d'1 milliard d'euros vers les entreprises en 2008, sans faire appel à la moindre administration. Une réforme du type de celle de l'EIS anglais permettrait de lever plus de 1 milliards d'euros par an pour les entreprises en phase d'amorçage. Pour défendre les PME françaises, autant préférer une multitude de lilliputiens qu'un Gulliver aux pieds et poings liés.
[1] le reste étant constitué pour moitié de participations de l'Etat dans les entreprises française, et pour l'autre moitié de participations de la Caisse des Dépôts