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3 000 000 de chômeurs et 30 ans d'inefficacité : le traitement social du chômage a-t-il encore une utilité ?

3 millions de chômeurs et on entend l'éternelle revendication sur le manque de moyens des services de l'emploi. Mais est-ce avec plus de moyens pour Pôle emploi que l'on résoudra le problème du chômage ? Non, car le constat est quasi unanime : Pôle emploi ne fonctionne pas.

[( Cette tribune de la Fondation iFRAP a été publiée sur Atlantico.fr mercredi 29 août 2012. )]

L'établissement public « donne encore l'impression d'un vaste chantier » (citation de Suzie Petit (CFE-CGC) dans le rapport Alduy 2011). Avec près de 160 demandeurs d'emploi par conseiller en moyenne, nous sommes encore loin des 60 théoriques. Par ailleurs, comme l'a souligné le rapport de l'Inspection générale des finances, seulement 33 % des effectifs de notre service public de l'emploi se consacrent à l'accompagnement et au placement des chômeurs, contre plus de 50 % pour le SPE, son équivalent britannique.

Les exemples étrangers ne manquent pas pour montrer qu'il est possible de faire mieux. L'Australie, par exemple, recourt intégralement aux opérateurs privés de placement (OPP), qui sont pour 79 % d'entre eux sans but lucratif. Régionalisés, spécialisés et attentifs à l'intensification de l'accompagnement, ils sont régulièrement évalués par le ministère de l'Emploi qui tient compte de leur performance dans la rémunération qu'il leur verse.

En France, à l'inverse, le recours aux OPP est timide et les données comparables sur l'activité et les résultats de Pôle emploi par rapport aux OPP sont peu nombreuses. Impossible, par exemple, d'obtenir des données budgétaires fines afin de comparer le coût de placement par Pôle emploi. D'après nos estimations, placer un demandeur d'emploi durablement reviendrait 1.000 euros plus cher par Pôle emploi que par un OPP, lorsqu'on les compare sur un service équivalent (Cap vers l'entreprise).

Pour lutter contre le chômage, un certain nombre d'idées reçues règnent encore. Parmi celles-ci figure celle qui consiste à augmenter le nombre d'emplois aidés. En 2011, sous le gouvernement précédent, 500.000 emplois étaient subventionnés à 70 % par l'État. Ces derniers sont sans doute socialement indispensables vu le taux actuel de chômage et politiquement inévitables. Mais les 150.000 emplois d'avenir annoncés pour 2013-2014 par le gouvernement pour les jeunes des quartiers en difficulté, après les 80.000 emplois aidés pour 2012, sont surtout symboliques.

[*Pour sortir du chômage, ce sont des emplois marchands qu'il faut créer et non des emplois publics ou parapublics (surtout dans la situation budgétaire de la France).*] Créer des emplois marchands ne se fera pas contre mais avec les entreprises. Et aussi avec les plus fortunés qui sont potentiellement, si la fiscalité les y incite, les investisseurs des start-up et des emplois de demain.

Mais étrangement, alors même qu'on devrait renforcer les dispositifs comme les avantages Madelin et ISF-Tepa pour inciter les plus fortunés à investir dans notre avenir, il est question de les affaiblir. Une politique à contre-courant de ce que fait notamment Barack Obama qui, pour sa part, a parfaitement compris l'importance des entreprises de croissance pour l'avenir.

En France, nous créons des entreprises (plus de 500.000) mais sans emplois (moins de 40.000 entreprises sont créées avec un emploi). Les mesures à adopter pour stimuler la création d'emplois marchands sont simples : drainer les investissements des particuliers au maximum vers le démarrage des jeunes entreprises via des incitations fiscales (on le fait bien via le livret A pour financer le logement social), assouplir le code du Travail et le temps de travail pour permettre que les entrepreneurs qui renoncent à recruter embauchent…

Lutter contre le chômage passe donc avant tout par la valorisation de l'entrepreneuriat. Les œuvres d'art les plus importantes pour la collectivité ne sont-elles pas nos entreprises et plus spécialement nos jeunes pousses qui créeront les emplois de demain ? C'est aujourd'hui qu'il faut motiver ceux qui ont la fibre de la création et qui sont prêts à endosser la responsabilité de produire les emplois des autres. Plus que jamais en 2012, l'entreprise est d'intérêt général.

[( Pour en savoir plus, consulter l'étude de la Fondation iFRAP : "Pôle emploi, l'urgence d'une rénovation" )]