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Créer un lycée privé en France : l'exemple de Scholae

Scholae est un lycée privé associatif et laïc, installé à Saint-Hippolyte-du-Fort, dans le département du Gard, au pied des Cévennes. Créé à l'initiative de Jean Mortreux (35 ans et diplômé HEC), le lycée a ouvert ses portes en septembre 2010. Il accueille des élèves de seconde, première et terminale pour la préparation à un des baccalauréats généraux (L, ES et S). Actuellement, c'est un lycée "hors contrat". Il ne bénéficie donc pas de fonds publics.

Le montant de l'inscription annuelle, qui couvre les frais de scolarité et d'internat est de 1110€ par élève et par mois (540 € pour les ½ pensionnaires). Il s'agit d'un prix élevé, mais qu'il convient de mettre en parallèle avec le coût moyen d'un élève scolarisé dans le secondaire en France (11.400 € par an selon les données du ministère de l'EN). Au terme de 5 ans d'activité le lycée devrait pouvoir bénéficier de l'aide publique, devenir un lycée sous contrat, et ainsi démocratiser son accès.

Malgré le prix, des effectifs en hausse.

Malgré le prix, prohibitif pour de nombreuses familles, le seuil des 20 inscrits, nécessaire à l'équilibre des comptes, était déjà dépassé dès la première année. Avec très peu de dépenses de communication, l'effectif est passé de 26 à 38 élèves en 2011. Et les inscrits ne proviennent pas tous de milieux fortunés. Certaines familles plutôt modestes ou disposant de revenus moyens consentent un véritable effort (en utilisant des économies ou l'argent d'un héritage) pour inscrire leur enfant à Scholae. Cette année 40% des élèves dont le quotient familial est inférieur à 11.000€, bénéficient d'une réduction de 20% des frais de scolarité accordée par le lycée.

Autonomie, personnalisation et flexibilité en matière pédagogique.

Le lycée emploie huit salariés permanents. Les enseignants travaillent, pour l'instant, à temps partiel. Il est fait appel à des intervenants extérieurs pour les activités physiques et artistiques. L'autonomie de l'établissement a permis de constituer une équipe de professeurs partageant des motivations communes et de les associer au projet éducatif. Cela permet une plus grande cohésion au sein de l'équipe éducative.

L'emploi du temps est organisé pour respecter les rythmes biologiques des élèves : cours les matins, activités culturelles et sportives l'après-midi, étude, TD et tutorat en fin de journée). Une place importante est accordée aux activités transdisciplinaires et aux apprentissages artistiques. Le travail en groupe et l'autoévaluation sont encouragés. L'organisation pédagogique, relativement flexible, permet de répondre plus individuellement aux besoins des élèves, que ce soit à l'échelle individuelle, à l'aide d'un tutorat profs/élèves, ou dans l'organisation des activités de l'après-midi, pour lesquelles les élèves peuvent exprimer des préférences.

Un bilan hebdomadaire est réalisé tous les vendredis après-midi en présence des lycéens. Les enseignants se concertent une fois par semaine et participent à des réunions bimestrielles pour le bilan et le suivi des élèves, ainsi qu'à deux journées en début et en fin d'année. Cette capacité d'adaptation, liée à l'obligation de résultats a déjà conduit le lycée à modifier son fonctionnement cette année. Les études du soir seront davantage encadrées et pour certaines transformées en TD.

Précisons qu'autonomie ne veut pas dire absence de contrôle de la part des autorités publiques. C'est le cas de Scholae, dont l'ouverture a été soumise à une autorisation rectorale et dont les activités font l'objet d'inspections de la part des services de l'Académie de Montpellier.

L'objectif des promoteurs du projet n'est, bien sûr, pas financier, même si le lycée peut représenter, en soi, une "entreprise". C'est leur désir d'offrir des conditions d'étude différentes à des jeunes en rupture avec notre système éducatif, qui les a poussés dans cette aventure.

Ce type d'initiative est encore rare en France. L'existence de Scholae, relève presque d'un miracle tant les obstacles à franchir pour mener à terme un tel projet sont nombreux. Mais il pourrait être un précurseur et montrer la voie d'un renouveau possible de notre système éducatif. Sans en faire un modèle en soi, il démontre qu'il existe dans notre pays de véritables énergies au sein de la société civile pour porter des projets innovants capables de s'adapter à la diversité des problématiques éducatives sur l'ensemble du territoire. Libérer de telles initiatives permettrait de répondre aux besoins exprimés par de nombreuses familles, mais aussi par de nombreux enseignants qui cherchent à redonner du sens à leur travail.

D'ici quelques années, Scholae devrait devenir un lycée « sous contrat ». Cela ne devrait pas modifier les modalités de son fonctionnement. En effet, depuis un certain temps, l'administration de l'éducation nationale, consciente des rigidités et des échecs du modèle traditionnel incite les établissements à innover pour mieux répondre aux besoins éducatifs des élèves. C'est ce que Scholae, lycée privé associatif et laïc semble avoir réussi à faire, en toute autonomie, et avec un coût très réduit pour la collectivité.

Plus d'informations sur le site Internet de Scholae