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The Economist, l'ombre de ce qui fut une grande revue

Lecteur de The Economist depuis 1960 qui m'avait fait découvrir tant de merveilles, le chaos et Benoît Mandelbrot, la démographie des entreprises et David Birch, etc., j'ai arrêté il y a quatre ans et je m'en félicite en tombant par hasard sur le numéro du 4-10 avril 2009 sur l'"ascension des riches".

Pauvreté de l'information : parlant de la générosité des Américains pour les fondations, tout ce que The Economist a à dire est de se demander si les riches deviennent moins charitables.

Le magazine aurait pu s'interroger par exemple sur les raisons pour lesquelles entre la France et les USA, deux nations dont les rapports de richesse sont de 1 à 10, les montants des dons sont de 1 à 100 (2.4 millions d'euros contre près de 300 milliards de dollars).

Le magazine adopte ensuite comme argent comptant la thèse de Piketty et Saez sur la croissance des inégalités sans se demander si cette thèse n'est pas truquée. Il cite comme une source de son information The Economic Institute, un think tank de Washington que Wikipedia classe au centre gauche et où figurent des personnes aussi neutres que Robert Reich, un secrétaire d'Etat au ministère du travail avec Bill Clinton. Pas un mot de rapports en sens contraire comme ceux du Cato Institut montrant que les inégalités n'avaient pas changé en 30 ans et que l'erreur des auteurs était d'avoir pris les revenus taxés sans tenir compte, notamment, du fait que les changements de législation fiscale avaient conduit les "riches" à incorporer dans leurs revenus ce qui auparavant était gagné et conservé à travers des sociétés.

En fait il ne s'agit très vraisemblablement pas d'un accident ou d'un manque de professionnalisme des auteurs des articles visés ci-dessus mais tout simplement d'un biais idéologique à motifs commerciaux.

The Economist ne fait que se joindre à la cohorte des idéologues qui savent que la lutte des classes de Karl Marx reste un puissant agent politique ; avec les démocrates et ceux qui les soutiennent comme Paul Krugman, éditorialiste du journal de gauche le New York Times, ils savent qu'il y a plus de gens en bas de l'échelle des revenus, donc d'électeurs et potentiellement de lecteurs qu'en haut.

Le biais commercial a été pratiquement avoué par The Economist au moment de la campagne de réélection de Georges Bush en 2004 : dans un éditorial, le magazine a reconnu que l'essentiel de son lectorat n'était plus en Grande Bretagne, sa patrie, mais aux USA et que, là-bas, ses lecteurs ne se trouvaient pas dans l'Amérique profonde des campagnes, mais dans les villes, qui votent en majorité démocrate.

Heureusement, beaucoup d'hommes libres ont conservé leur liberté de jugement et savent que les riches sont indispensables à une société (qui, sauf les riches, ont soutenu la création par les activités des plus belles œuvres d'art de l'humanité, depuis la Renaissance italienne jusqu'au siècle de Louis XIV voire même Peggy Guggenheim, Bernard Arnaud ou François-Henri Pinault ?). Ils regrettent seulement que The Economist qui leur a fait découvrir tant de secrets économiques au fil des ans ait perdu l'objectivité qui faisait sa force.