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Des patrons traités comme des voyous

Décourageons l'entrepreneur, arrêtons la fête

"Je m'appelle Jean-Claude, je suis salarié dans une PME métallurgique. Mon travail reste pénible malgré les évolutions technologiques. Avec une dizaine de collègues, nous cotisons chaque mois pour nous offrir notre dîner de fin d'année. En 2003, nous optons pour un dîner dansant, histoire d'agrémenter notre sortie. Ambiance assurée. Ce n'est pas tous les jours que l'on peut s'offrir ce petit luxe. La musique est entraînante. Nous sommes venus en minibus pour boire en toute tranquillité. Nous venons à peine de finir le plat de résistance, quand policiers et gendarmes font irruption dans la salle de restaurant. Avec les attentats terroristes, et surtout depuis ce foutu « 11 septembre », on peut s'attendre à tout. La présence policière est toujours rassurante pour l'honnête citoyen.

Mais que ce passe-t-il ? La fête est interrompue. Le patron est emmené en garde à vue. L'atmosphère devient soudainement glaciale. Nous sommes priés de rentrer chez nous, sans dessert, ni café. Les discussions et les suppositions vont bon train. Tous les scénarios sont évoqués, de Ben Laden à James Bond. Et avec toutes ces histoires de pédophiles ! Qui sait ?

Le journal de surlendemain décrit le crime du restaurateur : "non déclaration à l'Ursaff de deux serveuses en extra". Question sensations fortes, on s'attendait à mieux. Cette affaire est somme toute d'une grande banalité. Pour une fois que nous étions aux premières loges, nous aurions aimé quelque chose de plus original, par exemple une histoire à scandale. Et puis, ce brave patron, plutôt jovial, n'avait pas la tête d'un criminel. Le restaurant restera fermé pendant de longs mois. Je ne pensais pas que l'on pouvait traiter ainsi d'honnêtes consommateurs qui ont eu leur fête gâchée par la fermeture précipitée de l'établissement ce soir-là. Etait-il vraiment nécessaire que ce petit patron passe la nuit au poste ? Il n'avait pas l'air farouche et je suis certain qu'il se serait présenté à la police sur simple convocation après la fermeture normale de son établissement.

En ce qui nous concerne, nous avons décidé de ne jamais devenir PATRON, car c'est bien trop dangereux, dans notre pays, par les temps qui courent."

Episode extrait du livre "l'Entreprise malade des fonctionnaires" par René Hans chez l'Harmattan 2005.