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Impôts : vers la création d'un référent fiscal unique pour le contribuable ?

A l'occasion d'un récent article, nous avions eu l'occasion de démontrer combien l'institution d'un référent fiscal unique au sein de l'administration fiscale des contributions Luxembourgeoise, était propice à la sérénité fiscale du contribuable grand-ducal. Nous formulions dans cet article le vœu que l'administration fiscale française prenne modèle sur son homologue luxembourgeoise et institue un tel interlocuteur à la faveur de la fusion des services décentralisés de la DGFiP, à savoir les centres des impôts (les services d'assiettes), et les perceptions du Trésor public (s'occupant de la collecte) dans les SIP, services des impôts des particuliers.

Les services des impôts des particuliers

Les services des impôts des particuliers ou SIP sont des services déconcentrés issus de la fusion DGI/DGCP qui a donné naissance à la nouvelle DGFiP. Situés au plus près des contribuables, ces services résultent de la fusion des anciens centres des impôts (chargés du calcul de l'impôt) et des perceptions du Trésor public (chargées de l'encaissement). Désormais, les contribuables disposeront "institutionnellement" d'une même adresse pour l'ensemble de leurs courriers fiscaux. Si l'interlocuteur institutionnel sera à présent unique, il ne l'est pas encore malheureusement "physiquement".

Or, actuellement plusieurs signes avant-coureurs semblent annoncer une première prise en compte du problème.

- Tout d'abord, Bercy a décidé de mettre en place les SIP (services des impôts des particuliers) à marche forcée : par trois arrêtés en date des 9, 17 et 26 mars 2009, ce sont pas moins de 147 SIP qui vont naître de la fusion de 294 services fiscaux déconcentrés. La fusion va s'échelonner entre les 13 mars et 30 avril, et concerner pas moins de 130 000 fonctionnaires (57,7% aux Impôts et 42,3% au Trésor). Cette étape de fusion des SIP représente une première marche vers un référent fiscal unique pour le contribuable, en matière d'assiette comme de recouvrement.

Quoi qu'il en soit les SIP auront dès à présent la vertu de représenter un gain de temps pour le contribuable dans ses rapport avec l'administration fiscale. Une centralisation des informations et de leur traitement qui devrait logiquement permettre de déboucher à terme sur une prise en charge plus stable et individualisée des foyers fiscaux et de leur situation fiscale personnelle dès début mai. Cependant, si l'institution locale devient unique avec les SIP, les référents fiscaux uniques eux, se font toujours attendre... mais des avancées ont lieu depuis peu dans ce domaine en ce qui concerne les expatriés fiscaux... ce qui pourrait à terme faire avancer les choses pour l'ensemble des contribuables.

- En matière de retour des expatriés fiscaux et des non résidents désirant se renseigner sur une domiciliation fiscale en France, les services de Bercy semblent décidés à mettre en place le principe de cet interlocuteur fiscal unique afin de sécuriser juridiquement leur rentrée au pays. C'est pourquoi le ministre du Budget Eric Woerth a lancé le SANR (Service d'accueil des non-résidents et expatriés) au niveau de l'administration centrale. L'accueil est volontairement sécurisé, proposant un service personnalisé et global sur l'ensemble des revenus du contribuable potentiel avec une démarche en deux temps :
D'une part le SANR proposera une simulation de la situation fiscale personnelle du contribuable en cas de rentrée en France, y compris anonymisée et transmise par l'intermédiaire d'un conseil.
D'autre part, et sur base de ces données, sous réserve de mauvaise foi, le SANR proposera aux candidats au retour un « rescrit domiciliation ». Ce document représente une prise de position formelle à l'endroit de la situation personnelle de l'individu qui en bénéficie ; une prise de position qui engage la responsabilité de l'administration, évitant toute remise en cause intempestive à l'occasion d'un contrôle ultérieur (sauf à faire la preuve, nous l'avons dit plus haut, de la mauvaise foi du déclarant).

On l'aura compris, ce régime « cousu-main » doit permettre de booster les retours des expatriés fiscaux et renforcer l'attractivité du régime impatrié voté dans le cadre de la loi de modernisation de l'économie du 4 août 2008 en son article 31, en sécurisant le parcours fiscal des patrimoines nouvellement domiciliés et les exonérations d'accueil promises.
Cela marque enfin, de la part des pouvoirs publics, un intérêt marqué pour les Français établis à l'étranger et une prise en compte attentive de leur situation particulière et minoritaire bien qu'essentielle sur le plan économique [1].

Les réformes fiscales en cours mettent donc en exergue une évolution de l'attitude du fisc vis-à-vis des citoyens non-résidents. Une prise en compte décisive qui introduit de facto un référent fiscal unique pour les citoyens français non résidents candidats à l'impatriation. Pour les citoyens français résidents, les SIP constituent un petit progrès encore insuffisant... et l'on peut se demander, en vertu du principe d'égalité devant l'impôt, quand est-ce que l'administration fiscale daignera accorder véritablement le bénéfice d'un référent fiscal unique pour tous !

[1] Actuellement, les 1,5 million de Français résidents à l'étranger sont représentés au Sénat (343 membres en 2008 portés à 348 en 2011) par 12 sénateurs. La loi de modernisation des institutions prévoit de dédier 11 députés sur 577 à la représentation de ces Français expatriés. Une évolution qui devrait permettre à ces Français du dehors, de peser sur les choix nationaux en matière de politiques publiques dans les deux assemblées.