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Taxe carbone : un formidable prétexte pour Big Brother

Un Etat de plus en plus inquisiteur

Prélever la taxe carbone sera facile : pour les carburants, il suffira d'augmenter la TIPP sur l'essence, le gas-oil et le GPL. Pour le charbon, le fuel et le gaz, il suffira de créer des TIPC, TIPF et TIPG. Mais pour la rétrocéder aux personnes adéquates, cela s'annonce très compliqué. Confesser ses revenus au fisc ne suffira plus, il va falloir se déhabiller complètement.

Depuis 1914, chaque année chaque Français a pris l'habitude de déclarer l'ensemble de ses revenus à l'Etat. Mais avec la taxe carbone, on franchira une nouvelle étape : il faudra aussi idéclarer ce qu'on fait de ses revenus. Pour répartir les fonds collectés grâce à la taxe carbone, le rapport Rocard propose de subventionner les personnes aux revenus modestes et/ou qui sont "forcées" de consommer des produits carbonés.

Seront aidées par exemple les personnes habitant à la campagne sans moyen de transport en commun pour aller faire les courses, aller travailler, consulter un médecin ou se rendre à l'école. Le rapport ne dit pas si les trajets pour visiter sa famille, soigner ses parents ou partir en vacances seront aussi pris en compte. Les distances, fréquences, coûts, types de véhicules devront sans doute être soigneusement renseignés sur des formulaires administratifs.

Pour les autres dépenses (chauffage, cuisine, eau chaude), les subventions compensatrices concerneront des personnes vivant en ville comme à la campagne, en logements collectifs comme en maisons individuelles. Les formulaires devront tenir compte de la taille du logement, du type d'équipement, du nombre d'habitants et du lieu d'habitation (un logement en montagne consomme plus qu'en plaine). Dans un pays où la moitié des personnes ont un revenu inférieur à 1500 € par mois, le nombre de bénéficiaires sera sans doute considérable, de l'ordre de 10 millions de ménages.

Neutraliser la taxe carbone pour ces personnes semble a priori équitable, mais va exactement à l'encontre de l'objectif qui est de les inciter à changer de mode de vie. Et pour faire la différence entre les "vrais" campagnards et les "faux" qui s'installent loin des villes par choix, ou pour vérifier que les logements sont bien équipés de chauffage au fuel et non pas au bois ou à l'électricité, il faudra certainement recruter de nombreux contrôleurs de taxe carbone, dont l'activité sera à son tour génératrice de CO2.

Avec la taxe carbone, la tendance de l'Etat de se mêler du mode de vie de chacun, de la façon dont chacun dépense ses revenus s'aggrave. Le bonus/malus automobile était un premier pas. Mais le propriétaire d'une petite voiture risque de dépenser son argent en voyages, sports mécaniques ou autres activités encore plus énergivores : la prochaine étape sera de devoir les déclarer. L'engrenage est en route, des poubelles à la salle de bains, Big Brother veut nous surveiller.