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Défi climatique : confusion française entre l'objectif et les moyens

La première leçon du management pour les nuls, c'est qu'il faut fixer les objectifs à atteindre, et laisser les équipes libres de trouver les moyens d'y parvenir. Leur créativité est étonnante. En ce qui concerne le climat, l'objectif, c'est de contenir le réchauffement climatique à moins de deux degrés. Pas de réduire la consommation d'énergie des Français, ni de préférer l'éolien au nucléaire ou la réduction de la consommation à l'utilisation du gaz. Tous les pays du monde l'ont compris, sauf l'Europe, dont la France qui a décidé de façon arbitraire comment atteindre cet objectif. Une méthode sûre pour faire les mauvais choix.

En 2014, la réduction de la production des gaz à effet de serre semble considérée comme le meilleur moyen de maîtriser l'évolution du climat. La nécessité pour la France, déjà un très bon élève dans cette matière, de s'engager d'urgence dans cette lutte fait légitimement débat. Mais, une fois ce choix fait, reste à décider de la meilleure façon d'y parvenir. Ni les deux superpuissances (Chine, États-Unis), les plus productrices de gaz à effet de serre, ni les 196 pays qui ont signé l'accord de la conférence onusienne de Lima sur le climat ne se sont engagés sur la façon dont ils vont tenir leurs engagements.

Engagements des différents pays au 1er janvier 2015
Chine commencer à réduire sa production de CO₂ autour de 2030
États-Unis réduire sa production de CO₂ de 26 à 28 % de 2005 à 2025
Accord de Lima réduire sa production de CO₂ de 40 à 70 % d'ici 2050
Europe (UE) réduire sa production de CO₂de 40% en 2030 par rapport à 1990
atteindre 27 % d'énergie renouvelable
réduire de 30 % leur consommation d'énergie par rapport à 1990
France réduire sa production de CO₂ de 40% en 2030 par rapport à 1990
réduire notre consommation d'énergie finale de 50 % en 2050 par rapport à 2012 (et de 30 % en 2030)
réduire notre consommation d'énergie fossile de 30 % en 2030 par rapport à 2012
atteindre 32 % d'énergie renouvelable en 2030 (23 % en 2020)
réduire de 33 % le pourcentage d'électricité d'origine nucléaire en 2025 par rapport à la situation de 2015
imposer la norme de construction RT 2012 qui favorise le chauffage au gaz au détriment de l'électrique

Rester agile

Comme on le voit ci-dessus, la France s'est enfermée dans le carcan le plus contraignant possible, alors que chaque année apporte des bouleversements (quantité, type, prix) dans le domaine de l'énergie [1]. Un engagement très imprudent qui, soit ne sera pas tenu, soit le sera aux dépens du niveau de vie des Français et du statut de la France. Personne, en 2014, ne sait ce qui va se passer dans le domaine de l'énergie d'ici 2050. La baisse de la consommation, l'efficacité énergétique par la technologie, le remplacement du charbon et du pétrole par le gaz [2], le nucléaire, le solaire, la capture du CO2, les agrocarburants produits à partir de plantes OGM, la réduction de la production des autres gaz à effet de serre sont des candidats crédibles. Et les candidats à venir sont encore inconnus. Toutes solutions qui peuvent, peut-être, permettre d'atteindre le véritable objectif : maîtriser l'augmentation de la température. Et non pas d'imposer aux Français des contraintes coûteuses et arbitraires comme de réduire la consommation d'énergie ou de diminuer le pourcentage de nucléaire en décidant a priori de fermer, par ou pour l'exemple, la centrale de Fessenheim.

[1] Le cas des Etats-Unis qui ont brutalement abandonné en 2010 un vaste programme de construction de nouvelles centrales nucléaires (notamment avec EDF) quand les promesses du gaz de schiste ont commencé à se concrétiser, montre qu'il est indispensable de rester agile.

[2] Une méthode très efficace pour les Etats-Unis qui ont pratiquement déjà atteint leur objectif pour 2025 : les Etats-Unis ont émis plus de 5 498 millions de tonnes de CO₂ en 2011. En 2012, les Etats-Unis ont la baisse d'émission de CO₂ la plus marquée, grâce au remplacement du charbon par le gaz de schiste dans les centrales électriques. En revenant à 5298 millions de tonnes d'émission de CO₂, les Etats-Unis reviennent à leur niveau du milieu des années 1990.