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Changement d'heure : 2,4 € d'économie par Français

A chaque changement d'heure, afin de justifier cette contrainte supplémentaire imposée aux Français, l'Administration avance l'argument « imparable » des économies d'énergie. Ainsi, le seul fait de changer d'heure permettrait de diminuer la durée d'utilisation de l'éclairage artificiel le soir, en été, en faisant correspondre les heures d'activité avec l'heure d'ensoleillement.

L'Ademe, (Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie) évalue le gain d'énergie à 1,3 milliard de kWh, soit, au prix de l'électricité, l'équivalent de 130 millions d'euros d'économisés. Et l'Ademe d'ajouter, que cela correspondrait à « remplacer 24 millions d'ampoules à incandescence par des lampes basse consommation ». Rapportée à la population française totale, cette économie revient en théorie à 2,4 euros par Français. Pourtant, il est impossible d'obtenir le détail des études permettant d'évaluer les économies d'énergie. Il faut donc faire confiance au message officiel.

Néanmoins, comme une mission parlementaire du Sénat l'a souligné, dès 1996, dans un rapport d'information intitulé : "Faut-il en finir avec l'heure d'été ?", la contribution de l'heure d'été aux économies d'énergie relèverait plus du mythe que de la réalité. D'une part, la France produit l'essentiel de son énergie grâce au parc électro-nucléaire, ce qui la met à l'abri des fluctuations de cours pour une large proportion de sa consommation (hors pics de consommation, où le parc thermique prend le relais).

D'autre part, les économies réalisées en principe seraient illusoires puisque l'heure d'éclairage artificiel gagnée le soir serait largement compensée par les dépenses supplémentaires induites en avril, septembre et octobre (d'après une étude allemande du Docteur Bouillon, réalisée en 1983, portée à notre connaissance par l'ACHED [1]), pour l'éclairage et le chauffage en début de matinée. En outre, la diffusion des lampes fluorescentes à basse consommation minorerait un peu plus le montant d'une économie d'énergie que les estimations les plus optimistes situent entre 0,3 et 0,5% au maximum (chiffres en accord avec une étude récente de la commission énergétique de Floride, sur le même sujet).

En bref la conclusion du rapport, à l'époque était très mitigée : "étant donné ces influences compensatoires, il est possible de conclure que l'heure d'été apporte un certain bénéfice par rapport au bilan total de la consommation d'énergie". En 2000, le Sénat avait également soumis un avis identique : « l'utilité du changement d'heure n'est donc pas patente, compte tenu des inconvénients qu'il comporte par ailleurs en termes de pollution de l'air et de confort de vie ».

Les économies d'énergie rapportent, mais plus aux serviteurs de l'Etat qu'aux Français. Ainsi, l'Ademe est le fer de lance de cette noble mission, plus forte et présente que jamais dans le paysage énergétique français. Sa mission, les économies d'énergie, à coups de subventions, diagnostics personnalisés et de campagnes de communication. A ce titre, elle a reçu 330 millions d'euros de subventions en 2005, et employait 852 personnes. Son budget, en 1986, atteignait « seulement » 157,56 millions d'euros (en euros constants). Même si les économies dues à l'heure d'été étaient avérées, elles ne couvriraient pas la demande croissante de subventions de cet organisme public !

Depuis l'harmonisation européenne concernant le passage à l'heure d'été, la question de son abandon semble désormais exclue. Les gains d'énergie pourraient d'ailleurs s'avérer positifs avec le risque de déclin de notre parc nucléaire. En revanche, le fromage de la politique étatique des économies d'énergie n'est pas près de voir sa taille diminuer.

[1] association contre l'heure d'été double